IVRAF FA 0030 : Mbind Toko Waly (la maison de Toko Waly) : Différence entre versions
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− | De son vrai nom | + | De son vrai nom Waly Gnilane Bakhoum, Toko Waly (« Tokoor » signifie en sérère oncle maternel) est né au XIXème siècle à Djilas, un village situé à quelques kilomètres de Fimela. Fils de Diène BAKHOUM et de Mayé FAYE, Toko Waly est le cadet d’une fratrie de cinq enfants (Gnilane, Birame, Ngor, Hama-djiguène et Waly). Il grandit à Djilas et se fit remarquer très tôt par ses qualités de rassembleur. En effet, selon les témoignages de Hama-Djiguène BAKHOUM, sa seule fille vivante, Toko Waly était un leader d’opinion qui défendait à chaque fois les droits des classes démunies. C’est à la mort de son père qu’il décida de rejoindre sa lignée maternelle (les Taaboor) basée en majorité à Djilor. |
− | C’est également dans cette maison que Senghor venait régulièrement s’imprégner des préceptes de la culture sérère auprès de Toko Waly, son seul oncle à Djilor. En effet, SENGHOR était très attaché à son oncle comme en témoignent ces | + | A Djilor, il s’installa juste à coté de la mer et fonda progressivement un très grand foyer de quatre femmes et de plusieurs enfants. Après quelques années à Djilor, il fut rejoint par sa sœur Gnilane Bakhoum (mère de Senghor) qui venait juste de perdre de son premier mari. C’est d’ailleurs dans cette maison que Diogoye, le père de Senghor rencontra Gnilane et l’épousa avec le consentement de Toko Waly. |
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− | Par ailleurs, selon Pierre BASSE, c’est à cause de son attachement à son oncle que Diogoye, qui ne voulait pas que son fils devienne paysan, décida d’envoyer le petit Léopold à Ngasobil auprès des | + | C’est également dans cette maison que Senghor venait régulièrement s’imprégner des préceptes de la culture sérère, auprès de Toko Waly, son seul oncle à Djilor. En effet, SENGHOR était très attaché à son oncle comme en témoignent ces versets extraits de Chants D’ombre : « Toko’ Waly mon oncle te souviens tu des nuits de jadis quand s’appesantissait ma tête sur ton dos de patience ? Ou que me tenant par la main, ta main me guidait par ténèbres et signes»? |
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− | Plus tard et malgré ses responsabilités politiques (député à l’époque) SENGHOR venait régulièrement voir son oncle pour apprendre davantage de sa culture. A la fin de sa vie Toko | + | Par ailleurs, selon Pierre BASSE, c’est à cause de son attachement à son oncle que Diogoye, qui ne voulait pas que son fils devienne paysan, décida d’envoyer le petit Léopold à Ngasobil auprès des Pères de la congrégation du Saint Esprit pour qu’il y reçoive une éducation stricte. Mais cela n’a diminué en rien son dévouement envers son oncle car, à chaque fois que l’occasion se présentait, il n’hésitait pas à marcher à pied de Ngasobil à Djilor, juste pour voir Toko Waly, parfois à l’insu de son père. |
− | A l’époque, la structuration de la maison était toute autre. En effet, selon les témoignages recueillis sur place, la maison était composée de quatre | + | |
+ | Plus tard et malgré ses responsabilités politiques (député à l’époque), SENGHOR venait régulièrement voir son oncle pour apprendre davantage de sa culture. A la fin de sa vie, Toko Waly ne sortait pratiquement plus de la maison à cause d’une cécité qui l’a handicapé jusqu’à sa mort. | ||
+ | A l’époque, la structuration de la maison était toute autre. En effet, selon les témoignages recueillis sur place, la maison était composée de quatre cases en paille. A gauche se situait l’appartement de Moussa Diamé Famaak (cousin de Toko Waly) et celui de Toko Waly, plus loin à gauche. Juste en face de l’entrée principale se dressait la case de Moussa Diamé Ndeb (un autre cousin de Toko Waly). Enfin, la case de Gnilane Bakhoum se situait sur la partie droite de la maison. La maison avait deux portes : une porte principale qui faisait face au village, et une porte secondaire qui s’ouvrait sur le bras de mer le Saloum. Depuis, la maison a connu une très nette évolution : l’architecture actuelle est le fruit d’un long processus de modification et de réfection qui a mis à contribution la famille toute entière (cousins, fils et petits-fils de Toko Wally). | ||
===Description=== | ===Description=== | ||
− | + | Située à l’est du village, « Mbind Toko Waly » est une maison ordinaire qui se confond avec le décor. La façade de la maison est constituée d’un mûr en ciment tandis que le reste de la maison est clôturée par une palissade fabriquée avec des pétioles de rônier. C’est une maison très mal entretenue avec des bâtiments en état de dégradation avancée et des cases dont la plupart menacent de tomber. En effet, la maison compte sept appartements disposés de gauche à droite, trois cuisines, trois toilettes et deux portes. Ainsi, sur la façade droite, se dresse un bâtiment de deux chambres avec des portes et fenêtres grises. Cet appartement est mitoyen à un petit bâtiment qui sert de cuisine. Plus loin, à droite, se dressent deux appartements : le premier est constitué de briques en ciment avec une toiture et des portes en zinc. Il est composé de cinq chambres et d’un salon. Le deuxième appartement qui se dresse latéralement est recouvert d’un enduit gris à l’extérieur et d’une peinture jaune à l’intérieur du bâtiment. Il est composé d’une véranda, de quatre chambres et d’un salon. Il couvert d’une toiture en ardoise. Ce bâtiment est également rattaché à deux cabines de douches. Derrière lui, trois cases qui servent successivement de cuisine, grange et d’enclos pour cheval. | |
− | La partie gauche de la maison est beaucoup plus dense. Elle abrite | + | La partie gauche de la maison est beaucoup plus dense. Elle abrite trois appartements et une case en paille qui sert de chambre. Le premier appartement à gauche est recouvert d’un enduit gris avec des fenêtres rouges et des portes bleues. Il abrite quatre chambres et un salon. Derrière ce bâtiment se trouvent deux petits bâtiments dont l’un est un magasin tandis que l’autre sert de toilettes. A l’extrême gauche se dressent l’ancien appartement de Toko Waly et un nouveau bâtiment de deux chambres. L’ancien appartement de Toko Waly est composé de quatre chambres et d’une véranda plafonnée en ardoise. Il est recouvert d’un enduit gris avec des portes grises et des fenêtres rouges. |
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− | La maison de Toko Waly s’ouvre sur la mer dans sa partie | + | La maison de Toko Waly s’ouvre sur la mer, dans sa partie est. Sur la berge se dresse une petite case qui sert d’embarcadère pour les pirogues des pêcheurs. |
===Croquis (le cas échéant)=== | ===Croquis (le cas échéant)=== | ||
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===État sanitaire=== | ===État sanitaire=== | ||
− | Mauvais. | + | Mauvais. |
− | + | ===Lieux associés (autour de la même thématique)=== | |
− | + | Djilas : village d’origine de Toko Waly. | |
− | + | Ngasobil : village dans lequel SENGHOR était envoyé pour échapper l’éducation paysanne de Toko Waly. | |
+ | Mbind Diogoye de Djilor: maison paternelle de SENGHOR. | ||
+ | Yayème, Samba Dia : villages que traversait SENGHOR pour aller se réfugier à « Mbind Toko Waly ». | ||
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+ | Joal, Mbissel, Ndangane, Fimela, Simal, Diofior, Loul Séssène, Fa oye, Dionewar : villages appartenant au royaume d’enfance de Senghor. | ||
− | ''' | + | =='''''Culture(s) orale(s) en lien avec l'ensemble patrimonial'''''== |
− | + | ===Légende(s) et/ou mythe(s) associé(s)=== | |
− | ''' | + | '''Mythe du fagot de SENGHOR :''' « Un jour, Senghor partit en brousse chercher du bois avec ses frères. Au retour, il refusa de porter son fagot qu’il jugea trop lourd. Une fois à la maison, ses frères se précipitèrent vers leur père pour le dénoncer. Mais, comme par miracle, le fagot de SENGHOR se trouvait parmi ceux de ses frères. Lorsque Diogoye vérifia, le décompte était bon ». '''BASSE Nicolas''' |
− | + | ===Anecdote(s),discours,impression(s)sur l'ensemble patrimonial=== | |
− | + | « Senghor avait beaucoup d’égard et de respect pour sa famille maternelle. Il considérait les membres de sa lignée comme les dignes représentants des pauvres. » BASSE Pierre | |
− | + | « Toko Waly était animiste, mais à la fin de sa vie, il se convertit à l’islam. » BASSE Pierre | |
+ | « Comparée à la tombe de Gnilane, celle de Toko Waly parait très modeste car il le voulait ainsi. C’est une tombe ordinaire qui a été construite par ses fils conformément à ses recommandations ». BASSE Pierre | ||
− | + | «Alors qu’il était à l’école de Joal, Senghor fuguait souvent pour venir rejoindre mon père (Toko Waly). C’est alors que Diogoye, pour les séparer, décida de l’envoyer à l’internat de Ngasobil où il fut séminariste » Hama Djiguène BAKHOUM, fille de Toko Waly | |
+ | « L’amour de SENGHOR pour Toko Waly s’expliquait par la place de l’oncle maternel dans la société sérère. C’était presque un deuxième père pour lui ». BASSE Nicolas | ||
− | + | « Toko Waly était un homme aimable. Il était tellement aimé et respecté par les habitants de Djilor qu’ils lui ont généreusement donné quatre femmes ». BASSE Nicolas | |
− | + | « Toko Waly avait le sens du leadership ; il était intègre et respectueux de l’opinion des autres. D’ailleurs c’est lui qui a appris à SENGHOR l’art de gouverner ». BASSE Nicolas | |
− | « | + | « SENGHOR tenait beaucoup à sa lignée maternelle ; la dernière fois qu’il m’a reçu, il a beaucoup pleuré. Son amour pour nous était indéfectible » DIOME Poda, fille de Mbaye Gnilane DIOME (fils issu du premier mariage de Gnilane). |
− | + | ===Utilisation(s) actuelle(s)de l'ensemble patrimonial=== | |
− | + | maison des descendants de Toko Wally | |
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− | + | ===Fonctions initiales et utilisation(s) actuelle(s)de l'ensemble patrimonial=== | |
− | + | Fonction(s) initiale (s) : maison de Toko Waly | |
− | + | Utilisation (s) actuelles (s) : maison des descendants de Toko Wally, lieu de mémoire | |
===Statut et signification actuelle de l'ensemble patrimonial=== | ===Statut et signification actuelle de l'ensemble patrimonial=== | ||
− | + | '''Statut :''' propriété privée des descendants de Toko Waly | |
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+ | '''Signification actuelle :''' La maison de Toko Waly est considérée comme la maison où tout a commencé. Les descendants de Senghor et de Toko Waly accordent une haute valeur patrimoniale à cette maison de leur oncle maternelle eu égard à la valeur et à l’importance de la lignée maternelle dans la société sérère. | ||
===Informations complémentaires sur l'ensemble patrimonial=== | ===Informations complémentaires sur l'ensemble patrimonial=== | ||
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+ | Nous avons proposé la maison de Toko Waly dans la liste des patrimoines « à classer » dans la mesure où c’est un lieu symbolique auquel SENGHOR tenait énormément de son vivant. De plus nous pensons qu’on ne peut pas retracer l’histoire de SENGHOR sans parler de la maison de Toko Waly où il a reçu ses premières leçons de vie. Autant que la maison royale de Diakhao, la maison de Toko Waly mérite son classement au patrimoine historique et culturel du Sénégal. | ||
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+ | Par ailleurs, ce classement donnerait à la maison un visage décent et digne de SENGHOR. Pour tout passionné de SENGHOR, la visite de cette maison est un plaisir insondable. Mais ce plaisir est malheureusement dilué par le piteux état dans lequel se trouve cette maison qui, en période d’hivernage, est souvent envahi par les eaux de mer. Cette préoccupation est d’ailleurs la plus pressante comme en témoignent les propos de cette petite-fille de Toko Waly : « en période d’hivernage, l’eau de mer envahi la maison. Face à cela, on a que ces troncs de rôniers que nous dressons de façon à contenir l’avancée de la mer, mais ce n’est pas suffisant ». | ||
=='''''Sources'''''== | =='''''Sources'''''== | ||
===Bibliographie=== | ===Bibliographie=== | ||
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===Tradition orale=== | ===Tradition orale=== | ||
− | + | BAKHOUM Hama Djiguène, fille de Toko Waly interrogée à Djilor Djidiack | |
− | + | DIOME Poda, fille de Mbaye Gnilane (fils ainé de Gnilane Bakhoum, issu de son premier mariage) interrogée à Djilor | |
− | + | BASSE Nicolas, PCR de Fimela de 1996 à 2000 interrogé à Djilor | |
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+ | BASSE Pierre, fonctionnaire en retraite, auteur d’un livre sur SENGHOR, interrogé à Yayème | ||
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+ | SENGHOR Théophile Manga, fonctionnaire en retraite, neveu de SENGHOR, interrogé à Ndangane | ||
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+ | ===Sources écrites=== | ||
+ | BASSE Pierre, ''Le royaume d’enfance dans la poésie de SENGHOR'', communication prononcée à l’occasion d’un débat sur SENGHOR à la faculté des lettres et sciences humaines de l’UCAD | ||
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Version actuelle en date du 10 octobre 2013 à 14:53
Sommaire
- 1 Références du dossier documentaire
- 2 Désignation
- 3 Localisation
- 4 Historique et description
- 5 Culture(s) orale(s) en lien avec l'ensemble patrimonial
- 5.1 Légende(s) et/ou mythe(s) associé(s)
- 5.2 Anecdote(s),discours,impression(s)sur l'ensemble patrimonial
- 5.3 Utilisation(s) actuelle(s)de l'ensemble patrimonial
- 5.4 Fonctions initiales et utilisation(s) actuelle(s)de l'ensemble patrimonial
- 5.5 Statut et signification actuelle de l'ensemble patrimonial
- 5.6 Informations complémentaires sur l'ensemble patrimonial
- 6 Sources
- 7 Illustrations
Références du dossier documentaire
Numéro du dossier
IVRAF_FA_0030
Date d'enquête
Le 11/10/2012
Nom et prénom de l'enquêteur
SECK Badé
Désignation
Dénomination(s) actuelle(s)
Maison
Appellations successives
Mbind Toko Waly
Type de patrimoine
Patrimoine matériel
Thématique
SENGHOR
Localisation
Communauté rurale
Fimela
Lieu-dit/quartier/autre
Adresse
Références cadastrales (le cas échéant)
Section :.......... N° parcelle(s) :..........
Géolocalisation
Latitude :14°06'53.55 Nord
Longitude :16°39'15.48 Ouest
Historique et description
Acteur(s)
Toko Waly et ses descendants
Date/période de réalisation
XIXème siècle
Historique
De son vrai nom Waly Gnilane Bakhoum, Toko Waly (« Tokoor » signifie en sérère oncle maternel) est né au XIXème siècle à Djilas, un village situé à quelques kilomètres de Fimela. Fils de Diène BAKHOUM et de Mayé FAYE, Toko Waly est le cadet d’une fratrie de cinq enfants (Gnilane, Birame, Ngor, Hama-djiguène et Waly). Il grandit à Djilas et se fit remarquer très tôt par ses qualités de rassembleur. En effet, selon les témoignages de Hama-Djiguène BAKHOUM, sa seule fille vivante, Toko Waly était un leader d’opinion qui défendait à chaque fois les droits des classes démunies. C’est à la mort de son père qu’il décida de rejoindre sa lignée maternelle (les Taaboor) basée en majorité à Djilor.
A Djilor, il s’installa juste à coté de la mer et fonda progressivement un très grand foyer de quatre femmes et de plusieurs enfants. Après quelques années à Djilor, il fut rejoint par sa sœur Gnilane Bakhoum (mère de Senghor) qui venait juste de perdre de son premier mari. C’est d’ailleurs dans cette maison que Diogoye, le père de Senghor rencontra Gnilane et l’épousa avec le consentement de Toko Waly.
C’est également dans cette maison que Senghor venait régulièrement s’imprégner des préceptes de la culture sérère, auprès de Toko Waly, son seul oncle à Djilor. En effet, SENGHOR était très attaché à son oncle comme en témoignent ces versets extraits de Chants D’ombre : « Toko’ Waly mon oncle te souviens tu des nuits de jadis quand s’appesantissait ma tête sur ton dos de patience ? Ou que me tenant par la main, ta main me guidait par ténèbres et signes»?
Par ailleurs, selon Pierre BASSE, c’est à cause de son attachement à son oncle que Diogoye, qui ne voulait pas que son fils devienne paysan, décida d’envoyer le petit Léopold à Ngasobil auprès des Pères de la congrégation du Saint Esprit pour qu’il y reçoive une éducation stricte. Mais cela n’a diminué en rien son dévouement envers son oncle car, à chaque fois que l’occasion se présentait, il n’hésitait pas à marcher à pied de Ngasobil à Djilor, juste pour voir Toko Waly, parfois à l’insu de son père.
Plus tard et malgré ses responsabilités politiques (député à l’époque), SENGHOR venait régulièrement voir son oncle pour apprendre davantage de sa culture. A la fin de sa vie, Toko Waly ne sortait pratiquement plus de la maison à cause d’une cécité qui l’a handicapé jusqu’à sa mort. A l’époque, la structuration de la maison était toute autre. En effet, selon les témoignages recueillis sur place, la maison était composée de quatre cases en paille. A gauche se situait l’appartement de Moussa Diamé Famaak (cousin de Toko Waly) et celui de Toko Waly, plus loin à gauche. Juste en face de l’entrée principale se dressait la case de Moussa Diamé Ndeb (un autre cousin de Toko Waly). Enfin, la case de Gnilane Bakhoum se situait sur la partie droite de la maison. La maison avait deux portes : une porte principale qui faisait face au village, et une porte secondaire qui s’ouvrait sur le bras de mer le Saloum. Depuis, la maison a connu une très nette évolution : l’architecture actuelle est le fruit d’un long processus de modification et de réfection qui a mis à contribution la famille toute entière (cousins, fils et petits-fils de Toko Wally).
Description
Située à l’est du village, « Mbind Toko Waly » est une maison ordinaire qui se confond avec le décor. La façade de la maison est constituée d’un mûr en ciment tandis que le reste de la maison est clôturée par une palissade fabriquée avec des pétioles de rônier. C’est une maison très mal entretenue avec des bâtiments en état de dégradation avancée et des cases dont la plupart menacent de tomber. En effet, la maison compte sept appartements disposés de gauche à droite, trois cuisines, trois toilettes et deux portes. Ainsi, sur la façade droite, se dresse un bâtiment de deux chambres avec des portes et fenêtres grises. Cet appartement est mitoyen à un petit bâtiment qui sert de cuisine. Plus loin, à droite, se dressent deux appartements : le premier est constitué de briques en ciment avec une toiture et des portes en zinc. Il est composé de cinq chambres et d’un salon. Le deuxième appartement qui se dresse latéralement est recouvert d’un enduit gris à l’extérieur et d’une peinture jaune à l’intérieur du bâtiment. Il est composé d’une véranda, de quatre chambres et d’un salon. Il couvert d’une toiture en ardoise. Ce bâtiment est également rattaché à deux cabines de douches. Derrière lui, trois cases qui servent successivement de cuisine, grange et d’enclos pour cheval.
La partie gauche de la maison est beaucoup plus dense. Elle abrite trois appartements et une case en paille qui sert de chambre. Le premier appartement à gauche est recouvert d’un enduit gris avec des fenêtres rouges et des portes bleues. Il abrite quatre chambres et un salon. Derrière ce bâtiment se trouvent deux petits bâtiments dont l’un est un magasin tandis que l’autre sert de toilettes. A l’extrême gauche se dressent l’ancien appartement de Toko Waly et un nouveau bâtiment de deux chambres. L’ancien appartement de Toko Waly est composé de quatre chambres et d’une véranda plafonnée en ardoise. Il est recouvert d’un enduit gris avec des portes grises et des fenêtres rouges.
La maison de Toko Waly s’ouvre sur la mer, dans sa partie est. Sur la berge se dresse une petite case qui sert d’embarcadère pour les pirogues des pêcheurs.
Croquis (le cas échéant)
État sanitaire
Mauvais.
Lieux associés (autour de la même thématique)
Djilas : village d’origine de Toko Waly.
Ngasobil : village dans lequel SENGHOR était envoyé pour échapper l’éducation paysanne de Toko Waly. Mbind Diogoye de Djilor: maison paternelle de SENGHOR.
Yayème, Samba Dia : villages que traversait SENGHOR pour aller se réfugier à « Mbind Toko Waly ».
Joal, Mbissel, Ndangane, Fimela, Simal, Diofior, Loul Séssène, Fa oye, Dionewar : villages appartenant au royaume d’enfance de Senghor.
Culture(s) orale(s) en lien avec l'ensemble patrimonial
Légende(s) et/ou mythe(s) associé(s)
Mythe du fagot de SENGHOR : « Un jour, Senghor partit en brousse chercher du bois avec ses frères. Au retour, il refusa de porter son fagot qu’il jugea trop lourd. Une fois à la maison, ses frères se précipitèrent vers leur père pour le dénoncer. Mais, comme par miracle, le fagot de SENGHOR se trouvait parmi ceux de ses frères. Lorsque Diogoye vérifia, le décompte était bon ». BASSE Nicolas
Anecdote(s),discours,impression(s)sur l'ensemble patrimonial
« Senghor avait beaucoup d’égard et de respect pour sa famille maternelle. Il considérait les membres de sa lignée comme les dignes représentants des pauvres. » BASSE Pierre
« Toko Waly était animiste, mais à la fin de sa vie, il se convertit à l’islam. » BASSE Pierre « Comparée à la tombe de Gnilane, celle de Toko Waly parait très modeste car il le voulait ainsi. C’est une tombe ordinaire qui a été construite par ses fils conformément à ses recommandations ». BASSE Pierre
«Alors qu’il était à l’école de Joal, Senghor fuguait souvent pour venir rejoindre mon père (Toko Waly). C’est alors que Diogoye, pour les séparer, décida de l’envoyer à l’internat de Ngasobil où il fut séminariste » Hama Djiguène BAKHOUM, fille de Toko Waly
« L’amour de SENGHOR pour Toko Waly s’expliquait par la place de l’oncle maternel dans la société sérère. C’était presque un deuxième père pour lui ». BASSE Nicolas
« Toko Waly était un homme aimable. Il était tellement aimé et respecté par les habitants de Djilor qu’ils lui ont généreusement donné quatre femmes ». BASSE Nicolas
« Toko Waly avait le sens du leadership ; il était intègre et respectueux de l’opinion des autres. D’ailleurs c’est lui qui a appris à SENGHOR l’art de gouverner ». BASSE Nicolas
« SENGHOR tenait beaucoup à sa lignée maternelle ; la dernière fois qu’il m’a reçu, il a beaucoup pleuré. Son amour pour nous était indéfectible » DIOME Poda, fille de Mbaye Gnilane DIOME (fils issu du premier mariage de Gnilane).
Utilisation(s) actuelle(s)de l'ensemble patrimonial
maison des descendants de Toko Wally
Fonctions initiales et utilisation(s) actuelle(s)de l'ensemble patrimonial
Fonction(s) initiale (s) : maison de Toko Waly
Utilisation (s) actuelles (s) : maison des descendants de Toko Wally, lieu de mémoire
Statut et signification actuelle de l'ensemble patrimonial
Statut : propriété privée des descendants de Toko Waly
Signification actuelle : La maison de Toko Waly est considérée comme la maison où tout a commencé. Les descendants de Senghor et de Toko Waly accordent une haute valeur patrimoniale à cette maison de leur oncle maternelle eu égard à la valeur et à l’importance de la lignée maternelle dans la société sérère.
Informations complémentaires sur l'ensemble patrimonial
Nous avons proposé la maison de Toko Waly dans la liste des patrimoines « à classer » dans la mesure où c’est un lieu symbolique auquel SENGHOR tenait énormément de son vivant. De plus nous pensons qu’on ne peut pas retracer l’histoire de SENGHOR sans parler de la maison de Toko Waly où il a reçu ses premières leçons de vie. Autant que la maison royale de Diakhao, la maison de Toko Waly mérite son classement au patrimoine historique et culturel du Sénégal.
Par ailleurs, ce classement donnerait à la maison un visage décent et digne de SENGHOR. Pour tout passionné de SENGHOR, la visite de cette maison est un plaisir insondable. Mais ce plaisir est malheureusement dilué par le piteux état dans lequel se trouve cette maison qui, en période d’hivernage, est souvent envahi par les eaux de mer. Cette préoccupation est d’ailleurs la plus pressante comme en témoignent les propos de cette petite-fille de Toko Waly : « en période d’hivernage, l’eau de mer envahi la maison. Face à cela, on a que ces troncs de rôniers que nous dressons de façon à contenir l’avancée de la mer, mais ce n’est pas suffisant ».
Sources
Bibliographie
Tradition orale
BAKHOUM Hama Djiguène, fille de Toko Waly interrogée à Djilor Djidiack
DIOME Poda, fille de Mbaye Gnilane (fils ainé de Gnilane Bakhoum, issu de son premier mariage) interrogée à Djilor
BASSE Nicolas, PCR de Fimela de 1996 à 2000 interrogé à Djilor
BASSE Pierre, fonctionnaire en retraite, auteur d’un livre sur SENGHOR, interrogé à Yayème
SENGHOR Théophile Manga, fonctionnaire en retraite, neveu de SENGHOR, interrogé à Ndangane
Sources écrites
BASSE Pierre, Le royaume d’enfance dans la poésie de SENGHOR, communication prononcée à l’occasion d’un débat sur SENGHOR à la faculté des lettres et sciences humaines de l’UCAD
Illustrations
Photographies actuelles
Sous plusieurs angles, si justifié
Documents anciens (photographies, peintures, gravures...)
Préciser le(s) lieu(x) de conservation, y compris dans le cas de collections personnelles