IVRAF FO 169: Les rites d'initiation à Toubacouta,la circoncision

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Références du dossier documentaire

N° de dossier

IVRAF_FO_169

Date d’enquête

21/11/2013

Nom et prénom de l’enquêteur

MBENGUE BODIEL

Désignation

Dénomination(s) actuelle(s)

Rite, cérémonie, initiation

Appellations successives

Kassay boyo, Jujuboyo (Circoncision)

Type de patrimoine

Patrimoine immatériel

Thématique :

Localisation

Commune

Département : Foundiougne

Communauté rurale : Toubacouta

Lieux-dits

Village : Toubacouta

Adresse

Références cadastrales (le cas échéant)

Section :.......N° parcelle(s) :........

Géolocalisation

Latitude : …………………………………………….

Longitude : …………...…………………………….


Historique et description :

Acteur(s) :

Ancêtres mandings.

Date/période de réalisation :

Indéterminée.

Historique :

La circoncision est une pratique dont l’origine se perd dans la nuit des temps : les Egyptiens y recouraient dès la plus haute Antiquité. Chez les mandings, il semble qu’elle soit devenue une pratique rituelle depuis des siècles déjà et se transmet de génération en génération. Dans presque toutes les communautés sénégalaises, elle est une étape décisive de la vie de l’homme (fille et garçon dans certaines ethnies). La communauté mandingue de Toubacouta ne déroge pas à cette règle. La circoncision, appelée Jujuboyo ou Kassayboyo, y est une étape essentielle dans la constitution de l’identité que chaque homme doit franchir, et qui s’accompagne de cérémonies complexes et variées. (kankourang et jambadong par exemple). C’est un rituel qui consiste à amener l’enfant à la case de l’homme.

La finalité de ces cérémonies d’initiation, au delà de la perpétuation d’une tradition ancestrale, est de parfaire l’éducation des adolescents qui en bénéficiaient. On leur enseigne ce que les parents ne peuvent leur apprendre. En effet, la circoncision, en tant que rite initiatique, est une école de la vie. Elle a pour, entre autres, objectifs d’inculquer aux adolescents les valeurs de discipline, de respect (surtout envers les ainés), de discrétion et d’abstinence car, pour eux, le sexe ne devient organe de procréation qu’après la circoncision. Chez les Sose, le rite est associé à une émancipation sociale. En effet, le non-initié ne peut, par exemple, ni se marier, ni être enrôlé, moins encore participer aux prises de décision de sa communauté. C’est pour cette raison que l’initiation est un moment crucial très attendu par l’adolescent qui veut s’affirmer et participer activement à la société.

Description :

Les rites autour de la circoncision débutent en générale pendant la saison sèche, entre le mois de février et le mois de juin, période à laquelle les hommes ne sont pas occupés dans les champs et aussi parce que cela nécessite une retraite dans la forêt pendant trois mois. La cérémonie suit un protocole bien défini.

Dans les temps, la cérémonie se préparait pendant une dizaine d’années parce que tout dépendait de la possibilité financière des parents qui se partageaient les frais. Etaient concernés les garçons entre 5 et 12 ans. Tous les parents qui ont un enfant en âge d’entrer dans la case de l’homme étaient informés à l’avance de la date de la cérémonie. Le regroupement pouvait réunir jusqu’à cent ou plus, enfants ou adolescents. Le jour-J, les candidats à la circoncision sont conduits avant l’aube, par leurs parents, à un endroit précis qui sert de lieu de regroupement qui peut être la maison du « forgeron » qui devra pratiquer l’acte médical où une veillée est organisée jusqu’à l’aube. Ensuite, le selbé en chef, Ngassim-bah, secondé par ses assistants, Ngassim-diobo, guident les candidats vers l’aire de circoncision appelée Jujuwa (prononcer Dioudiouwa). Lorsque les futurs circoncis sont rassemblés, ils sont rejoints par le « forgeron » qui les circoncira avec un couteau issu d’un haut-fourneau . A cet effet, le circoncis porte un pagne tissé à la main fourni par la mère, qu’il s’attache à la ceinture. Ensuite, accompagnés de chants traditionnels, les circoncis sont conduits dans la forêt où ils seront en retrait pendant trois mois. Cet endroit est un abri provisoire ou une case dont la toiture est faite de tige de mil et de lattes de faaraa, tout est fait de paille. C’est là que les enfants, futurs hommes vont apprendre tout de la vie, dans leurs relations avec leurs parents, avec leurs pairs. Ils y apprennent à chasser, le rôle de chef de famille, également, les rudiments de la vie sociale : l’apprentissage de la chasse, la pose de pièges, la pêche. Ils y apprenaient, enfin, à reconnaitre les plantes qui guérissent et la sauvegarde des rites et traditions de leur communauté. Le stade du savoir étant l’aboutissement de tous les processus initiatiques.

Et lorsque le besoin se fait sentir, il peut être fait appel au fambondi ou au kankourang, qui est un personnage mythique central qui a pour mission de protéger les initiés contre les mauvais esprits, mais aussi pour résoudre les problèmes qui surgissent entre les familles. L'intervention du masque dans l'initiation des adolescents favorise une inscription sur leurs corps réels ou symboliques des codes et des valeurs culturelles mandingues.

Au terme de ce trimestre de reclus, les circoncis se préparent à quitter la forêt. Le retour se fait dans une ambiance de chants spécifiques tout au long du chemin. Avec leurs guides, ils prennent un détour au fleuve pour prendre un bain, mettent des habits propres. En se rapprochant du village, s’il y avait un mort pendant la retraite, on exhibait le pagne du défunt comme un étendard, accompagné d’un chant spécifique et c’est de cette manière que la mère éplorée apprenait la perte de son fils. Ensuite, chacun est accompagné chez lui. Ce jour, les parents qui en ont les moyens peuvent organiser une fête individuelle à la maison à l’occasion de laquelle une chèvre était sacrifiée le plus souvent. Ensuite, un jour est choisi pendant lequel les circoncis, habillés de pagne tissé traditionnel de la tête au pied, entrent dans les maisons chantant dansant. Des pièces d’argent, des biscuits ou encore des céréales leur sont offerts en guise d’offrande. Le soir, une grande fête, une veillée, est organisée à la pace du village. Durant cette veillée, les circoncis s’adonneront au Ngassing ndondo (danse du circoncis) qui est une sorte de danse de vérité et qui permet de savoir parmi les initiés ceux qui sont effectivement guéris et ceux qui sont encore en convalescence, ces derniers étant trahis par les pas de danse. Ainsi, ces nouveaux circoncis pouvaient désormais prendre part à toute activité dans le village ; ils intègrent le cercle des hommes.

Croquis (le cas échéant) :

De l’élément patrimonial et/ou de sa position dans son environnement.


État sanitaire

Très bon  Bon  Passable  Mauvais

Valeur patrimoniale : ……………….

Lieux associés (autour de la même thématique) :

Sédhiou, Ziguinchor : régions où se pratique encore la circoncision traditionnelle

Mali, Guinée, Gambie : pays d’origine de la culture mandingue

Culture(s) orale(s) en lien avec l’élément patrimonial

Légende(s) et/ou mythe(s) associé(s) :

Mythe : La circoncision et l'excision amènent l'enfant à fixer une âme en chassant l'autre, et à solidement récupérer son vrai sexe, homme ou femme, lui permettant ainsi de posséder une véritable identité sexuelle. Alhassane Chérif

Le mythe de Sira : Leity Mbassor et Sira Mandingue s’aimaient. Leity était l’esclave du mari de Sira. Le mari découvrit l’infidélité de sa femme et mutila partiellement le phallus de Laity (origine de la circoncision). De l’union de Layti/Sira naquit Sara sira qui, à l’âge mûr, fut circoncis par son père. Sira découvrit l’enclos sacré des circoncis et fut mise à mort afin de garder le secret du mbar (enclos, abri des circoncis). Les différentes parties de son corps correspondent aux éléments de construction du mbar. Babacar Sédikh Diouf (1981).

Anecdote(s), discours, impression(s) sur l’élément patrimonial :

Anecdote 1: Les gens se réunissaient chez le forgeron et lui chantaient ses louanges « faire de la fille une jeune femme, le forgeron en est capable. Faire du garçon un homme, c’est le forgeron qui en est capable ». Alors le circonciseur s’excitait et s’il est détenteur de savoir occulte, séance tenante, il fait quelque chose d’extraordinaire : un serpent peut surgir devant tout le monde. Et là, c’est la magie. (Bala Kanté)

Anecdote 2 : Si de nos jours, nous continuons à circoncire nous-mêmes nos enfants, c’est parce que le circoncis par le docteur ne vit pas longtemps ou a des problèmes de maternité. Par contre, un enfant circoncis avec le couteau de fer du haut-fourneau aura les poils blancs et engendrera des enfants robustes et bien portants. (Bala Kanté)

Anecdote 3: Dans la région de Sédhiou et particulièrement dans le département de Goudomp, c’est au mois de septembre, à la veille de la rentrée des classes, que les parents décident de faire entrer les enfants dans le rituel traditionnel de la case de l’homme. Au cours de ce mois, au moins une séance de Kankurang et de Jambandong est organisée toutes les semaines et tout le monde se sent concerné par cet événement. (Doudou Mané)

Anecdote 4: Les enfants perdent de plus en plus leurs repères, ne se retrouvent plus. Il est important que les jeunes retournent à la case des hommes où ils sont imprégnés pendant un mois de la tradition, de certaines valeurs qui leur permettent d’intégrer le monde des grands hommes. (Doudou Mané)

Fonction(s) initiale(s) et utilisation(s) actuelle(s) de l’élément patrimonial :

Fonctions initiales : perpétuation d’une tradition, école de la vie

Utilisations actuelles : perpétuation d’une tradition ancestrale, hygiène charnelle

Statut et signification actuelle de l’élément patrimonial :

Statut : patrimoine culturel à classer

Signification actuelle : tradition en voie de disparition, vecteur de transmission de culture

Informations complémentaires sur l’élément patrimonial :

Sources

Bibliographie

Dans le cas d’une publication : NOM DE L’AUTEUR (Prénom de l’auteur), Titre de la référence, lieu d’édition/de conservation, éditeur/organisme de conservation, n° éventuel, année, pages ... à …

Dans le cas d’un témoignage oral : NOM, Prénom et fonction de l’auteur, lieu, référence éventuelle à un témoignage enregistré.

Tradition orale

DIAME Insa, Artiste, Toubacouta

DIOUF Keba, Auxiliaire de justice à la retraite, Toubacouta

MANE Fatou, Reine, Sipo

Sources écrites

Rokhaya Fall/Sokhna, Histoire et références identitaires des populations du bas-saloum, p.351,

ETHIOPIQUE: revue socialiste de culture négro-africaine, Les traditions orales du Gabu: Actes du Colloque international sur les traditions orales du Gabu, organisé, à Dakar, du 19 au 24 mai 1980 par la Fondation Léopold Sédar Senghor, 223 p. 1981, NEA Dakar

DIRECTION DU PATRIMOINE CULTUREL, journée national du patrimoine : patrimoine immatériel et lieux de mémoire, du 16 au 18 juin 2006, Dakar.

DIATO Seydi Alphousseyni, « Le Kankurang, masque d'initiation des mandingues de la Sénégambie », Mémoire de Master d'Arts plastiques, Ecole nationale des Arts du Sénégal, 2007.

BECKER Charles et MARTIN Victor, Notes sur les traditions orales et les sources écrites concernant le royaume du Sine, in Bulletin de l’I.F.A.N n°4 1972, DAKAR.

La circoncision et les cérémonies autour du Haut-fourneau, in Entretiens avec Bala Kanté : une chronique du Manding du XXe Siècle, BRILL, 2006, 154p. ; p45-47

CHERIF Alhassane, L’importance de la parole chez les Mandings de Guinée : Paroles de vie, paroles de mort et rituels funéraires, Ed. L’Harmattan, 01 janv. 2006, 310p. (pp.80-81).

Sitographie

Patrimoine immatériel : Kankurang et Jambadong, témoins de la culture mandingue, 16 mars 2012, http://www.lesoleil.sn/index.php?option=com_content&view=article&id=13084:patrimoine-immateriel-kankurang-et-jambadong-temoins-de-la-culture-mandingue&catid=78:a-la-une.

http://www.blog.sami-aldeeb.com/2011/10/02/senegal-grande-circoncision-en-milieu-manding-le-conseil-regional-deblaie-le-chemin-du-retour-a-la-case-des-hommes/.

Illustrations

Photographies actuelles

Sous plusieurs angles, si justifié

Documents anciens (photographies, peintures, gravures...)

 Préciser le(s) lieu(x) de conservation, y compris dans le cas de collections personnelles

Dessins/croquis